La Littérature et le Pouvoir au XVIIème siècle Censure, Mécénat et Académies
Au XVIIème siècle, littérature et pouvoir sont étroitement liés. Le pouvoir cherche à contrôler les productions artistiques, afin d’éviter toute contestation du pouvoir royal. Dans un premier temps, nous exposerons les principes de la censure, illustrés par l’affaire du Tartuffe. Ensuite, nous verrons le mécénat de cette époque. Enfin, nous montrerons plusieurs exemples d’académies, en particulier l’Académie française, et son rôle dans la querelle du Cid. Définition : La censure est l’examen qu’un gouvernement fait faire à des œuvres artistiques avant d’en permettre la publication. Avec l’invention de l’imprimerie, le pouvoir royal et l’Eglise se sont inquiétés de la force de pénétration de la presse, et de sa diffusion. A partir du XVIème siècle, tout écrit devait obtenir une autorisation préalable du pouvoir. La procédure pour l'auteur qui désire publier son œuvre, consiste à la déposer auprès du Chancelier, afin qu'un censeur en fasse le rapport. Les passages jugés choquants sont alors cartonnés, et l'administration conserve un exemplaire original afin de s'assurer que les passages désignés ont bien été supprimés à l'impression. Mais ce système ne fonctionna jamais correctement, car les décisions de censure étaient souvent contestées par le Parlement ou le clergé, ce qui conduisit les directeurs de librairies à accorder des permissions tacites autorisant des publications sous de fausses adresses, ou donnant des autorisations orales. Seuls les éditeurs parisiens avaient le privilège royal d’imprimerie (monopole d’édition et de diffusion). C’est pourquoi, les éditeurs provinciaux contrefaisaient les éditions parisiennes, ou éditaient des livres sans autorisation. De plus, tout ouvrage interdit en France pouvait tout de même trouver un éditeur en dehors du royaume. En fin de compte, les pamphlets et les écrits philosophiques subversifs étaient tout de même diffusés en France sans aucune restriction. L’affaire Tartuffe de Molière : En mars avril 1664, Molière écrit un premier Tartuffe, en trois actes. À l'occasion d’une fête donnée à Versailles par le roi, la troupe de Molière joue La princesse d'Élide, Les Fâcheux et Le Tartuffe. Cette dernière œuvre connaît un vif succès. Aussitôt, la cabale (parti dévot menée par la Compagnie du Saint-Sacrement) se déchaîne avec une violence et se lance dans la bataille, avec, à sa tête, Anne d'Autriche, mère de Louis XIV, devenue l'ennemie de Molière. La cabale remporte une première victoire en faisant interdire la pièce par le roi. Molière entreprend des démarches pour défendre son œuvre, sans résultat. Il reprend espoir quand un légat du Pape, le cardinal Chigi, s'y montre favorable, après une lecture privée. Malgré l’attaque du curé de Saint-Barthélemy, docteur en Sorbonne, qui traite Molière de «démon vêtu de chair» dans un pamphlet retentissant, Louis XIV accorde une gratification au dramaturge. À la suite de l'annulation d'une lecture dans un salon, Molière justifie les intentions de sa comédie auprès du roi. Par la suite, la Compagnie du Saint-Sacrement décide de ne plus nourrir la polémique. La pièce est représentée en privé en septembre chez Monsieur, frère du Roi, à Villers-Cotterêts, puis chez la Princesse Palatine, dans sa version en cinq actes. Elle est donc finalement réhabilitée. Définition : Le mécénat est une protection matérielle accordée à des artistes par des particuliers ou par le pouvoir royal. Le mécénat entraîne en contrepartie la reconnaissance de l’artiste dans ses œuvres et l’obéissance envers son mécène. Par exemple, Corneille a longtemps bénéficié du protectorat du Marquis de Liancourt, et de la famille de Soissons et des Longueville. Racine a bénéficié du soutien de Mme de Maintenon. Le mécénat des grands seigneurs et des princes pouvait toutefois troubler l’Etat, ces gens d’épées se faisant soutenir par des gens de plumes, comme ce fut le cas lors de la Fronde. C’est pourquoi, la politique générale du règne au XVIIéme siècle fut de dissoudre les clientèles d’artistes et de gens de lettres protégés par des particuliers. Le mécénat d’Etat fut instauré en premier par Richelieu. Par la suite, Colbert voulu qu’il n’y eût qu’un seul mécène, le roi. Les arts et les lettres allaient donc devenir un service public dont la fonction serait de glorifier le roi. Le mécénat royal s’exerce à travers le versement de pensions et le don de charges honorifiques. Ainsi, en 1677, Boileau reçut, avec Racine, la charge honorifique et très lucrative d'historiographe du roi. Les artistes voient, avec le mécénat ou le protectorat, leurs conditions de vie s'améliorer. Mais cela signifie une main mise de l'État sur la production littéraire, c'est-à-dire une forme de censure. Au XVIIéme siècle ont été crées plusieurs Académies :
La querelle du Cid : En 1636, Corneille fait jouer le Cid qui remporte un énorme succès. Richelieu protège Corneille, et le fait anoblir par le roi en 1637. Mais, Mairet et Scudéry, deux dramaturges jaloux vont attaquer Corneille, en l’accusant de ne pas respecter la règle des trois unités, règle instaurée en 1630 à la demande de Richelieu. Il l’accuse également de poignarder dans le dos la France en guerre contre l’Espagne, en produisant une pièce dont le sujet, les personnages et les décors sont espagnols. Richelieu demande à l’Académie française son opinion. Il pense en effet que l’Académie saisira l’occasion de paraître aux yeux de tous comme le tribunal suprême des lettres, de se faire connaître du public et d’obtenir ainsi l’enregistrement de son acte de fondation par le Parlement de Paris. Le 16 juin 1637, l’Académie présente un texte : Le Sentiment de l’Académie sur la tragi-comédie du Cid, qui contient un certain nombre d’observations de style, mais rien de bien méchant. Toutefois, Corneille n’accepte pas la moindre critique, et la querelle rebondit. Les adversaires de Corneille se déchaînent, et la polémique est relancée. Après quelques semaines, Richelieu, lassé de cette affaire, donne l’ordre d’en finir : il exige des adversaires de Corneille qu’ils mettent fin à la querelle. Par cette affaire, Richelieu a réussi à imposer son Académie française. Au XVIIème siècle, littérature et pouvoir sont donc étroitement liés, le pouvoir, à travers la censure et le mécénat, cherchant à imposer son point de vue, et à glorifier le roi. D’autre part, il réunit les artistes dans des académies, afin de codifier les règles de l’art. |